Episode 5 – Switch.
Vous vous rappelez des trois conditions nécessaires au changement ?
Les voici à nouveau : https://coachbruxelles.com/les-3-conditions-du-changement/
Comment faire dès lors pour donner une direction au conducteur ?
Dans leur incroyable livre « Switch », les frères Heath donne une série de solutions au conducteur de l’éléphant.
Trouver les lumières.
Quand nous cherchons à résoudre un problème et donc à définir une solution au travers de nouveaux objectifs, il arrive souvent à la plupart d’entre nous d’être complètement à côté de la plaque. Il m’est personnellement souvent arrivé de me mettre un objectif vague et général qui se révélait finalement être la meilleure assurance contre la réussite de mon projet. Un exemple ? Ce bon vieux objectif de manger plus sainement. Qui ne donne d’ailleurs aucune direction valable pour un quelconque changement de comportement.
Une façon accessible et facile de trouver une solution au problème est de trouver les « lumières », c’est-à-dire de vérifier si au sein de sa cellule familiale, de son équipe ou de son organisation, il y a des exceptions au problème qui sont des personnes qui n’ont pas ce problème du tout. Et de comprendre très précisément comment elles s’y prennent.
Les frères Heath donnent un exemple d’une association opérant au Vietnam dont un des objectifs donné par le gouvernement Vietnamien était de réduire la malnutrition infantile . Le responsable en charge du projet, Jerry Sternin, a très vite compris que l’objectif n’était pas le bon. Il a ainsi décidé de chercher auprès de la communauté dans laquelle il travaillait, les lumières (les frères Heath les appelle les « bright spots ») qui n’avaient pas ce problème. Il a ainsi trouvé des familles dont les enfants ne souffraient pas de malnutrition.
Jerry s’est rapidement aperçu que ces familles n’étaient pas des « anomalies » en ce sens qu’ aucun élément extérieur (comme des transferts d’argent d’un oncle d’Amérique) ne venait régler le problème de malnutrition. Elles avaient clairement mis en place des normes de nutrition très précises propices au bon développement de leur progéniture : nombre de repas, types de nourriture, introduction d’aliments moins connus de la communauté etc. Il lui fallait alors cloner ces comportements au sein de la communauté.
L’inconvénient à ce stade du projet pour Sternin fut le suivant : la connaissance ne fait pas changer les comportements. La pratique oui. Comment donc passer de la connaissance à la pratique ? Il décida d’organiser des groupes de cuisine dirigés par les mamans « lumières » et de donner des instructions très spécifiques sur comment cuisiner et avec quoi. Le savoir se propagea au sein de la communauté. La pression sociale de bien nourrir ses enfants fut telle que la culture de la communauté fut changée du tout au tout en terme de nutrition infantile.
L’avantage d’utiliser des solutions qui existent déjà au sein d’une communauté est le fait que ces solutions ne portent pas l’étiquette « Pas inventé ici ». La solution vient de la communauté.
Le conducteur de l’éléphant est donc bien un planificateur, un penseur pour un futur meilleur. Seulement il a aussi cette capacité de tourner en rond et de « sur analyser » les choses. Et cette analyse est souvent dirigée vers le problème plus que sur la solution au problème. Il lui arrive d’être victime d’une « paralysie de l’analyse ». C’est pourquoi, pour que les choses changent, il est crucial de montrer au conducteur quelle destination prendre, quels comportements adopter etc. C’est pourquoi les « lumières » sont si essentielles : elles portent l’espoir du progrès et du changement.
Imaginez un problème que vous avez et pour lequel vous aimeriez trouver une solution. Ok ? Vous l’avez ? Vraiment ? Cherchez bien. Dès que vous l’avez, passez au paragraphe suivant.
Votre problème en tête, je vais vous posez une question assez étrange. Supposez que vous alliez vous coucher ce soir avec votre problème toujours présent dans votre vie et que vous vous endormiez paisiblement. A un moment dans la nuit, un miracle se produit et le problème que vous avez s’est résolu. Quand vous vous réveillez le lendemain matin, quel est le premier petit signe que vous constatez qui vous fait dire que quelque chose s’est passé et que le problème a disparu ?
C’est la Question Miracle.
Identifiez un signe tangible que le problème a disparu. Qu’est-ce qui ne se passe plus et qu’est-ce qui se passe à la place ?
« Si je ne me disputais plus avec mon mari, je le laisserais parler tranquillement. Je ne le contredirais pas à tout bout de champ. On s’écouterait. »
» Si j’osais demander une augmentation de salaire, j’aurais plus confiance en moi et je serai proactive et force de proposition ».
Et puis, une fois que vous avez répondu à la question miracle, posez-vous la Question Exception : quand était-ce la dernière fois que vous avez vécu un peu du miracle, même pour un très court instant ?
« Quand était-ce la dernière fois que votre mari vous a écouté ? »
« Quand était-ce la dernière fois que vous avez été proactive ? »
C’est la preuve que vous êtes capable de résoudre votre problème car vous l’avez déjà résolu par le passé. Vous savez désormais ce qui a besoin d’être fait différemment.
Il y a des exceptions et, en analysant ces exceptions précisément en termes de comportements, vous avez la solution à vos problèmes. Ce sont vos situations « lumières ». Non seulement vous avez la direction mais aussi de l’espoir à donner à votre éléphant.
La voie du Kaizen.
Cherchez les lumières est souvent contre-intuitif dans les organisations voire suspect. Trop simple peut-être, pas assez d’analyse. Ce qui rejoint une croyance bien ancrée qui est de croire qu’à « grand problème, grande solution ». La plupart du temps, les grands problèmes sont solutionnés par une séries de petites actions mises bout-à-bout sur un temps plus ou moins long .
Quand le conducteur analyse un problème, il veut une solution qui soit à la mesure de la taille du problème. Si le trou est grand, il souhaite le boucher avec une solution de même taille. Chercher les lumières, c’est se poser la question : « qu’est-ce qui marche et comment faire plus de ce qui marche ? » en lieu et place de « Qu’est-ce qui est cassé et comment le répare-t-on ? » comme le conducteur aime à penser. Ce sont deux modèles mentaux différents.
Le conducteur aime se focaliser sur le négatif plutôt que sur le positif. C’est une focalisation sur le problème. Un biais néfaste au changement.
Votre enfant revient de l’école avec 4 A, 1 B et 1 F. Où va votre attention ? Exactement là où il y a un trou à boucher.
Et si le conducteur adoptait une approche plus positive ? A quoi ressemblerait nos journaux télévisés par exemple ? Un espace à trouver des solutions et uniquement des solutions ? Peut-être.
Toujours est-il que quand un changement est nécessaire, se focaliser sur les solutions est une nécessité.
Vous êtes manager. Combien de temps focalisez-vous votre attention sur la résolution de problèmes ? Combien de temps passez-vous à cloner les succès ?
Ces lumières éclairent le chemin du succès et donnent espoir que le changement est possible.
Tracer le chemin critique.
Votre conducteur souffre de paralysie de l’analyse ou paralysie décisionnelle. Plus celui-ci recevra d’information et de données, plus une décision sera difficile à prendre. Par exemple, plus vous ferez de rencontres sur un site de rencontres, plus vous aurez du mal à choisir « the one » ; plus vous recevrez d’informations sur des investissements possibles à souscrire, moins il vous sera facile de choisir. Il y a un moment où trop d’informations paralyse la prise de décision.
Le status quo est confortable parce que, justement, il n’y a pas de décision à prendre. Nous sommes en mode « pilote automatique » : pas de choix à faire, pas de self-contrôle à exercer.
En période de changement, le mode pilote automatique n’est pas adapté, les choix prolifèrent et les habitudes passées ne sont plus à l’ordre du jour. Changement rime avec nouveaux choix et incertitude. Il n’y a pas que le changement qui génère la paralysie décisionnelle. L’ambiguité est fatiguante pour le conducteur car elle crée de l’incertitude pour celui-ci qui doit conduire son éléphant sur de nouveaux chemins. Et l’éléphant préfèrera prendre les chemins qu’il connait parce que l’incertitude le rend anxieux. La paralysie décisionnelle est mortelle pour le changement car elle conduira toujours au status quo, le chemin le plus familier de l’éléphant.
On peut s’enorgueillir en tant que leader de créer une grande vision. Il est vrai que c’est critique pour avancer. Seulement, une vison grande et générale est paralysante en temps de changement car le changement se fait précisément dans les détails. Rappelez-vous que le manque de clarté crée de la résistance.
Pour créer du changement, il est nécessaire de scripter les changements critiques.
Le changement commence au niveau des actions et comportements individuels. Pour arriver à ces changements de comportements individuels, une solution est de donner un éclairage précis sur ce qu’on attend. Pas sur tout mais sur les changements dits critiques. Cela permettra de simplifier le processus décisionnel et d’éliminer l’ambiguïté.
Manger plus sainement, ce sera respecter quatre règles par exemple :
- une assiette à 50% composée de légumes, 25% protéines et 25% féculents (je ne suis pas nutritionniste. Ceci n’est qu’un exemple personnel pour illustrer mon propos),
- boire 1,5 l d’eau par jour,
- un demi-fruit en dessert,
- 3 sessions de 40 minutes de marche par semaine.
Clair, simple et plus de décision à prendre à chaque repas. Quand vous voulez amener quelqu’un à développer une nouvelle façon de faire, montrez-lui cette nouvelle façon.
Pour entretenir votre voiture correctement, est-il préférable d’avoir comme objectif de vous occuper régulièrement de votre voiture ou de procéder à un entretien tous les 15 000 kms ? Lequel des deux est le moins ambigu ?
Et plus votre objectif sera traduit en termes comportementaux, plus le changement sera possible.
La carte postale de destination.
Dans tout projet de changement, en dehors des objectifs court terme, nous avons besoin d’une photographie de la destination finale. A quoi ressemble mon terminus ?
Jim Collins et Jerry Porras décrivent dans leur livre « Build to last » ce qui distingue les entreprises à succès des autres :, c’est un objectif BHAG, a big hairy audacious goal. Un objectif final long-terme. Notre destination finale, notre carte postale n’est pas tout à fait un BHAG mais une destination à moyen terme.
Ce terminus donne une direction au conducteur et de la motivation à l’éléphant. Ce terminus évite au conducteur de se perdre dans trop d’analyse comme toujours car il préfère cette phase d’analyse à l’action, ce qui est un frein au changement, au switch.
Si la destination est attrayante, le conducteur mettra toutes ses ressources au service de l’atteinte de cette destination. Si elle ne l’est pas, il utilisera son énergie à décider où aller ou s’il faut vraiment y aller. Cette destination doit toucher au coeur et inspirer le conducteur et l’éléphant.
Qui ne connait pas les objectifs SMART ? Spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis. Ce type d’objectifs résoud les problèmes d’ambiguïté et d’adéquation des objectifs. Ils sont adaptés dans des situations stables. Par contre, ce ne sont pas les plus adaptés dans des situations de changements car ils présument l’émotion. Ils ne la génèrent pas.
Et que se passe t-il quand votre éléphant n’est pas si inspiré par la destination que vous lui présentez et qu’il résiste ? Un ennemi est dans la place qui s’appelle la rationalisation. La rationalisation est ce processus qui excuse le status quo et la continuité des anciennes habitudes à changer. « Oh oui, ce n’est pas bien grave de manger des gâteaux en dessert. Cela ne va pas changer grand chose. » C’est rationaliser l’échec. Une réponse à ce problème est de décider d’objectifs « noir ou blanc », « tout ou rien ». Même s’ils sont restrictifs et pas vraiment une destination carte postale, il n’ aura pas moyen pour vous de vous cacher en cas d’échec. Vous êtes au grand jour.
« Pas de gâteaux en dessert ». Point barre.
La rationalisation développe le potentiel d’inaction. Mieux vaut que les objectifs soient clairs, précis et restrictifs. L’idéal est de marier des objectifs comportementaux court terme critiques avec une carte postale de destination inspirante sans pour autant anticiper tous les trous dans la route entre aujourd’hui et la destination finale. Il sera bien tant de le faire au moment opportun.
Un bon début et une bonne fin sont les conditions nécessaires à la mise en mouvement.
Le conducteur est donc un visionnaire. Il sait faire des sacrifices à court-terme pour accéder à des changements long-terme. C’est un fin tacticien.
De plus, le conducteur a des réserves de self-contrôle limitées. Il est paralysé face à l’ambiguïté et aux choix difficiles et se focalise plus sur le problème que sur la solution.
Pour l’influencer positivement dans tout projet de changement, cherchez les lumières et clonez les succès.
Donnez-lui un bon départ en scriptant les changements critiques et une belle arrivée avec la carte postale de destination. Il sera équipé pour gérer les conflits avec son compagnon de taille, son éléphant.
Suite au prochain épisode…
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